dimanche 10 décembre 2017

Communes et territoires : Questions pour 2018

C’est en 2014 que l’inexorable processus de réduction des moyens financiers communaux a été instauré. Cette politique était déjà inscrite dans les projets des gouvernements Sarkozy - Fillon de 2007 à 2012. Beaucoup se souviennent encore des critiques acerbes, féroces que l’opposition de l’époque exprimait. Arrivée au pouvoir en 2012, elle n’a rien fait d’autre que d’engager sans le moindre état d’âme la politique de restriction drastique des ressources des collectivités :

  •   11 milliards d’euros de dotations en moins de 2014 à 2017.
C’était soi-disant notre « contribution à la réduction de la dette publique » … En 2007, cette dette était de 1 210 milliards d’euros ; en 2012 : 1 870 milliards ; au 1er juillet 2017 : 2 230 milliards. Dans cet agrégat incommensurable de dettes, la part des collectivités n’y représente que 200 milliards.
Le fort discret conseiller économique de M. Hollande lors de la campagne des présidentielles en 2012, devenu ensuite conseiller à l’Elysée, puis ministre de l’économie à partir d’août 2014, et enfin président de la République n’est pas étranger à cette cure d’austérité imposée aux collectivités. Les conséquences en sont connues : Ce fut l’arrêt sine die de l’investissement public communal ; celui qui par essence est au plus près des besoins des gens …
Aujourd’hui, sous l’égide du même homme d’État, le gouvernement de M. Edouard Philippe a décidé d’amplifier la politique de l’austérité locale. Ce sont maintenant 13 milliards d’économies à trouver !
La diminution des dotations entre 2014 et 2017 aura été conforme aux attentes (- 11 milliards) ; toutefois, force est de constater que les résultats ne sont pas pour autant au rendez-vous, puisque la dette publique a progressé de 17,6 % en 5 ans.
Le 3 août 2017, Le 1er Ministre écrivait aux maires : « Les collectivités ont déjà pris une part importante en subissant en un temps limité des baisses de leurs dotations. C’est une méthode que nous souhaitons changer : c’est d’abord par une réduction de leurs dépenses de fonctionnement et de leur endettement que les collectivités territoriales doivent contribuer, à hauteur de 13 milliards d’euros sur les cinq prochaines années au redressement de nos finances publiques. Un dispositif de suivi et de pilotage des dépenses des collectivités territoriales qui tienne compte de l’évolution de leurs charges et placé sous le contrôle du parlement sera mis en place … ».
Pour une grande partie des communes, il n’y a déjà plus de marges ou d’excédents suffisants pour dégager l’autofinancement destiné aux investissements ([1]). Aussi, le gouvernement a finalement décidé la « mise sous tutelle » des communes et autres collectivités au moyen du remplacement partiel de la Taxe d’Habitation par une allocation compensatrice. Grâce à cette nouvelle dépendance à l’État, celui-ci s’autorise donc à imposer la baisse des dépenses de fonctionnement à hauteur de 13 milliards d’euros. Lors du congrès des Maires, le 1er Ministre comme ensuite le Président de la République s’en sont tenus à formuler des hommages empathiques ; appuyés à l’excès à l’adresse des élus communaux.
Pour autant, sur le fond, rien n’a véritablement changé. Avec une telle politique, délibérément punitive, nous sommes assurés que le redressement du pays n’est pas pour demain.
Certes on nous parle de reprise, mais à y regarder plus sérieusement, ces nouveaux dépositaires du modèle ancien vont-ils enfin prendre conscience de la dégradation inexorable des indicateurs économiques structurels ? Ceux qui déterminent les résultats à long terme de l’économie nationale.
  • Le déficit du commerce extérieur se creuse de nouveau.
  •  La dette prospère encore et toujours.
  • L’économie productive poursuit son déclin sous le regard désinvolte des actuels tenants du pouvoir (serait-ce donc le cadet de leurs soucis ?)
  • Les écarts de richesse atteignent des proportions inégalées.
  •  Des territoires entiers se désertifient.
Mettre à bas les collectivités n’y changera rien. Inexorablement, nous allons nous enfoncer un peu plus dans ce délitement préjudiciable de la cohésion sociale tant locale que nationale.
Le 10 décembre 2017
Philippe Bonnin,
Maire de Chartres de Bretagne
Conseiller Départemental

Consulter également les chiffres 2018 Alternatives Économiques ; Oct 2017 – Les moteurs de l’activité – Compétitivité : la glissade continue – Le commerce extérieur dans le rouge – Qui est riche, qui est pauvre.

([1]) - Autofinancement : solde positif entre les recettes et les dépenses de fonctionnement. L’autofinancement permet de rembourser les emprunts et d’engager de nouveaux investissements.