mercredi 8 mars 2017

Rachat d’Opel par le groupe PSA

Le rachat d'Opel par le groupe PSA. La recherche de la taille critique dans une économie européenne en "petite reprise". Quelles attentes pour l'usine de "La Janais" et les sous traitants d'Ille et Vilaine?



En 2012, voici juste 5 ans le Président du directoire de Peugeot-Citroën, M. Varin, annonçait une « alliance stratégique » avec Général Motors. Très au fait à l’époque des énormes difficultés du groupe, nous avions accueilli cette nouvelle avec beaucoup d’intérêt. Vu de l’Ille et Vilaine, au premier abord, c’était abord une belle opportunité pour contribuer à conforter l’excellence industrielle du site de « La Janais ». En effet, l’usine était encore promise à la construction des véhicules « haut de gamme » et « premium ». Malheureusement, le doute est arrivé très vite lorsque cette hypothèse privilégiée tourna vite à l’avantage de Rüsselsheim ([1]) près de Francfort. Dès le mois de mai 2012, il était envisagé que la remplaçante de la « Citroën C5 » puisse t-être assemblée dans la même usine que la berline Opel « Insigna » en Allemagne.
Finalement, le partenariat avec General Motors tourna court. Il n’en a donc rien été.
Fin 2013, l’annonce d’un nouveau véhicule en remplacement de la « C5 » (P87 ou futur 5008), suivi d’une décision de recapitaliser en urgence la société Peugeot-Citroën en rupture de trésorerie par l’État et le conglomérat public chinois Dongfeng n’a pas été sans interrogations quant aux véritables perspectives pour « La Janais ». Le marché automobile européen était alors en plein marasme et la France perdait ses emplois productifs en masse.
Les délocalisations des fabrications vers l’Espagne et l’Europe Centrale se sont amplifiées jusqu’à nous interroger sur le véritable rôle de l’État français, puisqu’il était devenu « l’actionnaire de référence » chez PSA.
Dans le contexte qui a été celui de la restructuration du groupe au moyen de mesures sociales drastiques, de fermetures d’usines et de lignes d’assemblage, PSA retrouve son crédit industriel et commercial en Europe. L’offre de rachat d’Opel est en ce sens mieux engagée. C’est une stratégie certainement positive pour un groupe dont l’un des 1ers objectifs consiste pour l’heure à optimiser la performance de ses bases domestiques. En outre, notons bien que l’eldorado asiatique semble moins attractif qu’il l’était voici 2 ans encore …
Ces derniers jours, les dirigeants allemands, puis britanniques, ainsi que le puissant syndicat des salariés « IG-Métal » font preuve de la plus grande vigilance quant aux garanties pour l’emploi et la pérennité des usines d’outre Rhin et Manche. Dans l’instant, il ne faut pas négliger que les usines Opel-Vauxhall sont notoirement surdimensionnées. Une telle réalité n’est pas sans nous interpeler quant aux mesures que la prochaine gouvernance de l’ensemble industriel devra prendre d’ici 2020 ([2]).
Egalement, n’oublions pas que le marché automobile européen ne retrouvera plus de sitôt son potentiel d’antan. Ce marché restera très concurrentiel et extrêmement sensible à la qualité technologique et écologique des véhicules. Ceci nous imposera des efforts de compétitivité soutenus et récurrents ; en particulier par l’investissement dans la Recherche et Développement de nouveaux produits et process.
D’ores et déjà, nous attirons l’attention de nos futurs responsables politiques sur le sujet de la pérennité de nos propres usines en France. Ce sont là des interrogations déjà très clairement posées par les dirigeants politiques allemands et britanniques.
Nous-nous sommes toujours inscrits dans cette démarche d’analyse et de discernement des stratégies industrielles à l’échelon local comme national. Elle consiste à défendre toutes les filières de haute technologie, dont l’automobile, les sous-traitants et tous les emplois de service à l’industrie.
Ici même, l’enjeu reste évidemment très sensible, dans un contexte plus que tendu à la suite du déclin persistant du tissu et de l’emploi industriel comme agricole.

                                                      Philippe Bonnin,
                                                      Maire de Chartres de Bretagne,
                                                      Conseiller départemental.

([1]) - Berceau historique d’Opel.
([2]) - « La "cure Tavares" passera par l'emploi », prévient Stefan Bratzel, expert automobile allemand de l'institut CAM : « il va être nécessaire de réduire les surcapacités de production ». De son côté, M. Staudenmayer du cabinet de conseil en entreprises Advancy, présent en France et en Allemagne estime « que 5% des emplois totaux de PSA et Opel seront supprimés ».
Pour réduire les coûts, il faut plus de volume. « Quand on n'est pas sur le segment ’’premium’’ (haut de gamme), tout se joue notamment sur les coûts d'achat qui sont un levier énorme, confirme Marc Staudenmayer … »
« Même si PSA et Opel coopèrent déjà en matière industrielle, l'étape suivante sera de développer des modèles qui ont plus de composants communs. Ceci prendra plusieurs années », souligne Flavien Neuvy, directeur de l'observatoire Cetelem de l'automobile. « Les maux d'Opel sont connus : sous utilisation des usines, ventes peu rentables et gamme inadaptée sur fond d'image ternie ».
Source : Le quotidien « Nord-Littoral - Pas de Calais »  le 3 mars 2017. Par Tangi Quemener, avec Estelle Péard à Francfort.