Chartres de Bretagne, le 31 mai 2012
Monsieur le Ministre du Redressement Productif,
La commune de Chartres de Bretagne accueille près de Rennes les usines PSA (ex-Citroën) construites entre 1958 et 1960.
Dans
les années 70, cet établissement a compté jusqu’à 14 000 salariés.
Comme pour toute la filière automobile française, le déclin a débuté
dans les années 2004 - 2005. Nous sommes passés d’un effectif de 11 600
personnes en 2006 à 5 800 aujourd’hui. Dans le même temps, les emplois
directs concernés par la construction automobile en Ille-et-Vilaine ont
chuté de 25 000 à 13 000 (sous-traitants et sociétés de services
compris).
Pour
des raisons différentes de celles des usines PSA d’Aulnay et Hordain,
le site chartrain voit maintenant ses perspectives d’avenir s’assombrir
au gré des semaines. Les multiples dépêches de presse attestent de cet
état de fait.
L’établissement de Chartres est spécialisé sur le segment des véhicules qui correspondent aux gammes supérieures du groupe PSA (C5 Citroën et 508 Peugeot). Depuis octobre 2011, la baisse de charge conduit à l’enchaînement des jours chômés ; 32 jours précisément depuis octobre 2011.
Ce jeudi 31 mai 2012, la direction locale va annoncer la fin de l’équipe de nuit.
La
gravité de la situation dans laquelle se trouve l’usine me conduit par
conséquent à solliciter un entretien dans les meilleurs délais et
naturellement à votre convenance.
A
cette date, le projet d’alliance capitalistique en discussion avec GM –
Opel n’apporte aucune nouvelle rassurante ; bien au contraire. Le
départ pour l’Allemagne (Russelsheim près de Francfort) de la
remplaçante de la C5 en 2015 est annoncé depuis quelques jours. Tout
montre que la contrepartie consistant en l’annonce d’une fabrication
sous la marque Opel (Zafira ?) n’est pas acquise. Ce choix à sens unique montre également la réelle difficulté du groupe français à faire valoir la performance technologique de son outil industriel d’Ille et Vilaine. A terme, celui-ci perdrait les fabrications porteuses des références de la qualité du « made in France » et qui seraient par conséquent délocalisées en Allemagne.
Au-delà
de la prise de participation de General Motors dans PSA
Peugeot-Citroën, les experts n’hésitent plus à souligner que l’alliance
PSA-GM n’est d’aucune manière équilibrée et qu’elle fait craindre le
pire pour l’avenir du site France de l’automobile.
A
ce jour, je constate que seule la sollicitude du gouvernement
britannique pour relancer sa propre industrie automobile donne très
clairement ses premiers résultats pour les usines GM d’outre Manche
(Vauxhall) à Ellesmere Port entre autres. La déclaration du premier
Ministre Britannique, David Cameron qui se félicite d'un excellent
« travail d'équipe» entre son gouvernement et GM-Vauxhall (Source
Bloomberg le 17 mai) montre explicitement ce que sont les stratégies de
GM ; particulièrement attentives aux soutiens des pouvoirs publics
anglais.
Comme indiqué par Reuters le 24 mai : « le départ d'Allemagne
de l'Astra vers Ellesmere Port rend plus difficile encore le transfert
de la production d'autres modèles Opel ; cette fois vers l'Hexagone ». Enfin, selon Barclays Capital, « la
décision de GM souligne la volonté actuelle de prendre des décisions
difficiles, quitte à aboutir à davantage de confrontations entre les
deux partenaires (GM-PSA) sur leurs marchés nationaux"…
L’actuelle
fragilité du Groupe PSA Peugeot-Citroën l’a contraint à se tourner vers
un type de partenariat qu’il rejetait sur le fond comme sur la forme
voici quelques mois encore. Il s’en tenait alors seulement au
développement de coopérations techniques dont les résultats paraissaient
satisfaisants dans un contexte économique hors crise généralisée.
Dans
ce secteur particulièrement sinistré, seul l’Etat peut trouver les
réponses qui s’imposent. Des milliers d’emplois sont en jeu et c’est de
notre devoir partagé de tout mettre en œuvre pour les pérenniser et
redonner le dynamisme dont a besoin la filière nationale de
l’automobile.
Dans
l’attente de notre rencontre, je vous prie de croire, Monsieur le
Ministre de l’Économie, Monsieur le Ministre du Redressement productif,
en l’expression de ma très haute considération.
Philippe Bonnin