jeudi 30 mai 2013

Situation de PSA - La Janais Intervention de Philippe Bonnin, Maire



Conseil Municipal de Chartres de Bretagne, le 27 mai 2013

Le 24 mai dernier, nous avons participé à la 3ème réunion de concertation « tripartite » à propos de l’avenir du site de la Janais. Ces rencontres réunissent les représentants de PSA, les salariés, le Préfet avec les services de l’Etat, les parlementaires et les collectivités.
Depuis le dernier trimestre 2012, personne ne peut ignorer que la situation économique de la France s’est encore fortement dégradée. Les possibilités de « ré-industrialisation » en sont d’autant plus difficiles pour le site de La Janais à Chartres de Bretagne.

Voici moins de 6 mois, il était encore admis qu’on pouvait trouver des opportunités économiques porteuses d’avenir ; entre autres, grâce à la prospection de dimension internationale conduite par le groupe PSA lui-même, le cabinet BPI et l’Agence Française pour les Investissements Internationaux (AFII). Sur ce sujet, je tiens à saluer le travail de tous les acteurs engagés dans ce projet de ré-industrialisation. J’insiste aussi pour préciser que cette mobilisation doit être maintenue.

Malheureusement, force est de constater qu’à ce stade, nous en sommes arrivés à l’étude de projets locaux qui de fait, représentent bien peu d’emplois pérennes à terme. De surcroit, leur financement dépend pour l’essentiel des ressources publiques mobilisables et des fonds de revitalisation.

Ne pas remettre en cause la production automobile sur le site de Chartres – La Janais
A mon sens et comme l’a également formulé le Président du Conseil Général fin 2012, il importe que les « futurs projets soient parfaitement compatibles avec la poursuite de la fabrication d’automobiles » et plus globalement le développement des technologies de la mobilité. Remettre en cause la production automobile sur le site de La Janais au prétexte que demain des activités nouvelles (au demeurant marginales) viennent perturber l’organisation logistique de l’usine PSA, est tout simplement inadmissible.
Sur un autre plan, précisons bien que chaque projet de ré-industrialisation doit respecter les règlements d’urbanisme et les obligations législatives concernant la préservation de l’environnement ; considérant notamment la présence de la nappe phréatique tertiaire de Chartres de Bretagne. A cet égard, il est opportun de rappeler qu’il existe des zones d’activités à proximité de « La Janais », déjà bien aménagées pour recevoir sans délai des projets et qui ne seraient pas en lien direct avec la construction automobile.
En tout état de cause et à l’issue de cette première phase de prospection particulièrement décevante, il est maintenant nécessaire que les pouvoirs publics et les principaux responsables de ce dossier prennent très clairement la mesure de la situation. Dans ce contexte des plus angoissants pour les salariés de la filière et de leur famille, n’oublions pas également les défis sociaux auxquels chacun va devoir répondre…
En ce qui me concerne et depuis un an, je n’ai eu de cesse de livrer mon analyse et mes propositions au sujet de l’avenir de l’usine de Chartres, des sous-traitants de l’Ouest et bien évidemment de l’industrie automobile française au nom de la solidarité des territoires.
En ces heures plus que difficiles, les constructeurs dont les usines sont en état de survie, doivent enfin admettre que nos collectivités et l’Etat financent depuis des années la pérennité de la filière ; qu’il s’agisse des instituts de transferts de technologie, des pôles de compétitivité, des projets des associations régionales de l’Industrie automobile et d’autres instances qui concourent toutes à la formation ainsi qu’au développement des savoir-faire. A titre d’exemple, personne n’a ménagé ses soutiens pour contribuer à la conception des mobilités d’avenir et des véhicules du futur, tel que les constructeurs l’ont eux-mêmes souhaité. Au sein même de l’environnement scientifique et technique local, nous disposons de compétences en ingénierie qu’on ne retrouve nulle part ailleurs et ce grâce aux financements territoriaux.
Il est très clair que de tels réseaux sont encore mobilisables au-delà même de leur contribution actuelle pour développer les compétences destinées à une industrie automobile qui veut encore croire à son avenir. Ce sont là des atouts dont elle ne peut que tirer avantage pour renforcer la compétitivité de ses moyens productifs.
N’oublions pas que cette activité industrielle est devenue une source considérable d’innovations depuis 50 ans. Elles se sont diffusées au travers de tout le tissu des entreprises de l’Ouest. Ce qui place nos territoires parmi les premières régions françaises en termes de performance économique, de diversité des formations, et par voie de conséquence de dynamisme technologique qui de plus bénéficie d’activités de Recherche & Développement mutualisées.
Annoncer un nouveau modèle de véhicule avant l’été
Face à cette réalité que nous endurons tous, il est à croire que les décideurs des groupes automobiles ne disposent plus des outils d’évaluation économique suffisants pour considérer l’importance de tels potentiels de développement pour leur propre rebond en France et ici-même. Comme toutes les collectivités, la commune de Chartres de Bretagne est prête à soutenir ce travail dans l’intérêt de toute la filière automobile. L’un de ses principaux leviers était jusqu’à ce jour de pratiquer une fiscalité des plus basses parmi les communes des grandes agglomérations.
Il s’impose qu’en retour des moyens humains et financiers que nous mettrons de nouveau à contribution, l’industriel s’engage enfin et annonce de façon certaine, c'est-à-dire avec des échéances contractuelles rendues publiques, les plans de relance de l’activité automobile sur le site de Chartres de Bretagne. De tels engagements doivent être annoncés avant l’été.
Il n’est plus acceptable de voir un groupe industriel qui élude tout projet sérieux et directement lié à la filière automobile sur le site de la Janais à Chartres de Bretagne.
Il n’est plus acceptable de se contenter de vagues déclarations d’intentions, sans échéancier relatif au lancement effectif de la future C5 (projet industriel X8).
Cette exigence est d’autant plus justifiée en ce qui concerne le groupe PSA qu’il bénéficie de contributions publiques très conséquentes, tant nationalement que localement pour pérenniser les emplois au travers des aides au chômage partiel. Faut-il rappeler que dans ce pays, de nombreux établissements ne perdurent aujourd’hui qu’au moyen d’apports de fonds publics… qui viennent directement de l’Etat ou des fonds de l’assurance-chômage.
L’Etat a toute la légitimité pour reconstruire une stratégie de filière
Devant cet état de fait dont la gravité n’échappe à personne, je demande qu’au plus haut niveau de nos institutions, l’Etat joue enfin son rôle de « stratège » pour toute la filière automobile française, dans l’intérêt de tous les établissements concernés par cette industrie qui emploie encore des centaines de milliers de salariés en France : ouvriers, techniciens et ingénieurs de l’industrie automobile… C’est une véritable politique de redressement industriel que nous réclamons haut et fort, telle que formulée dans le Livre blanc de l’automobile, rédigé en 2012 par l’ACSIA (Association des Collectivités Sites d’Industrie Automobile).
Il est impératif que l’Etat mette enfin en place une stratégie de filière à moyen et long terme, digne de ce nom. Très clairement, il en va de l’avenir de nos territoires pour lesquels les alternatives économiques sont aujourd’hui bien minces. Cette politique de filière doit entre autre s’inscrire dans le cadre des appels à projets du « Plan automobile » défini courant juillet 2012 par le gouvernement français. Il s’agit d’une partie des sujets stratégiques développés dans le livre blanc de l’ACSIA ; ceci dès le premier semestre 2012. Malheureusement, force est de constater que nous sommes encore très loin des objectifs attendus, faute de gouvernance claire et surtout partenariale de la filière.
Parmi les pistes à explorer, alors que l’avenir de PSA reste extrêmement compliqué à discerner, il serait utile de réfléchir à l’élaboration de nouveaux partenariats de fabrication ; des coopérations en lien avec des constructeurs qui recherchent une présence active en Europe. D’ailleurs, c’est déjà le cas dans d’autres régions françaises et en Europe.
Alors que l’engagement (par dizaines de millions d’euros…) de l’Etat et des collectivités pour « tenir à bout de bras » l’usine de La Janais n’a jamais été aussi fort, l’heure n’est plus à disserter sur les stratégies du passé. Aucune n’a donné satisfaction jusqu’à cette date pour sortir PSA de la mauvaise passe qui est certes la sienne… mais tout autant la nôtre.
Collectivement confrontés à la situation intenable de l’usine de La Janais, la Municipalité de Chartres de Bretagne reste mobilisée et saura prendre ses responsabilités avec toutes les communes concernées par l’avenir de l’industrie automobile. Nous poursuivrons notre engagement pour redonner une perspective à l’usine de Chartres et bien sûr en coopération avec l’Etat, Rennes Métropole, le Département d’Ille et Vilaine et la Région Bretagne.

                                                                                 Philippe Bonnin