Comment des Etats surendettés peuvent prétendre recapitaliser des banques, tout justement rendues insolvables par la dette de ces mêmes Etats ?
70% des fonds bancaires français sont investis en obligations d’Etat issues de la zone Euro.
Þ En France : 270 milliards d’euros ;
Þ En Grèce : 60 milliards ;
Þ En Italie : 250 milliards.
Les assureurs sont engagés à hauteur de 340 milliards dans la dette française ; une dette qui atteint 1 700 milliards.
Depuis cet été, l’économie nationale est engagée dans un processus de rupture dont
personne ne mesure la dimension. La riposte à la crise n’est plus dans
le champ des petits aménagements budgétaires et fiscaux. Certes, il est
toujours intéressant de procéder à quelques « toilettages », mais la
déprime a atteint un tel stade que ces aménagements n’apporteront aucune
réponse à la hauteur des impératifs.
Faut-il laisser les banques s’effondrer avec la spoliation même
partielle des petits porteurs, ou faut-il qu’elles soient recapitalisées
par des rachats d’obligations d’Etat détenues par les dites banques ?
Le choix enfin décidé, il ne changera pas la réalité de fond que
constitue le processus de délitement financier auquel nous assistons.
Les options possibles devront seulement dépendre de l’appréciation du
scénario qui limitera au mieux l’impact de cette crise sur les plus
faibles ; sur ceux qui souffrent le plus.
Volatilisation d’actifs bancaires ou rachats d’obligations par
création monétaire, nous subirons dans tous les cas une dépréciation
radicale et durable de l’euro. Faut-il rappeler que Moody’s donne ce 18
octobre 2011 un sursis de trois mois seulement à la France pour
préserver son « AAA »…
La vraie « dé-mondialisation » !
Mécaniquement, la dépréciation de la monnaie unique va contracter les
importations devenues trop onéreuses ; inaccessibles. Enfin,
considérant la taille du 1er marché international qu’est
l’Europe, ce sera de fait la première rupture du processus historique de
mondialisation engagé à partir des années 2000.
Pour éviter une nouvelle rechute au-delà de l’actuelle débâcle
financière, la zone euro devra impérativement s’organiser. Le premier
acte : ce sera la constitution d’un nouvel et véritable espace de marché intégré. Certes, il sera moins ouvert du fait des coûts à l’importation (dévaluation inéluctable oblige !),
mais il va se réorganiser autour d’un même et vrai programme
économique, doté d’une gouvernance unique et nécessairement forte.
La mutation chinoise
L’intérêt d’un tel modèle serait qu’il devienne opérationnel à
l’horizon 2013-2014. En effet, cette nouvelle dynamique de l’Europe à
15, voire 17 tout au plus (l’actuelle zone euro) coïncidera
avec le début d’une nouvelle période durant laquelle la Chine va se
trouver confrontée aux mutations les plus conséquentes de ses « moteurs
de croissance » basés sur l’export.
Pour compenser le déclin de ses exportations engagé depuis la 1ère
phase de la crise financière américaine et européenne, l’Empire du
Milieu consacre d’ores et déjà 50% de son Produit Intérieur Brut à
l’investissement dans les Infrastructures du pays. Par contre, il cède
très peu sur les salaires pour « préserver » sa compétitivité assise sur
la faiblesse de ses coûts salariaux. En outre, les provinces chinoises
financent les grands travaux d’équipement par le recours massif à
l’endettement, faute de système fiscal local opérationnel.
De l’avis des meilleurs experts, c’est un modèle qui ne pourra continuer ; pas plus qu’il ne le fut ici.
Le retour de l’Europe ?
Aujourd’hui, force est de constater que les signes de grippage
apparaissent. Toutefois, il est probable que le gouvernement chinois
prendra le virage qui s’impose. La Chine nous libérera ainsi de son
modèle productiviste, tourné vers l’exportation et dont la pression sur
le reste de l’économie mondiale est devenue sans équivalent dans
l’histoire économique.
L’Union de la Zone Euro pourrait ainsi reprendre la main. Tout
dépendra de l’implication que l’Allemagne souhaitera y consacrer,
soucieuse qu’elle reste de préserver son avantage industriel. Un
avantage qui fatalement se retournerait contre elle si l’Europe
Occidentale continuait à se désarticuler … pour finir au « fond du
trou ».
De la situation actuelle, si nous avons quelques leçons à retenir, ce
doit être de retrouver d’indispensables latitudes de financement par
l’épargne dans les territoires. L’un des buts doit être de relancer les
investissements productifs et de construire une autre économie, plus
démocratique et bien plus re-distributive de valeur ajoutée locale et
socialement moins prédatrice.
Philippe
Bonnin