vendredi 15 novembre 2024

Crises économiques et financières actuelles, et à venir … Conséquences dans les territoires d’industrie.

Le cas de la construction automobile.                        Contribution

Voici 12 ans, L’Association des Collectivités Sites d’Industrie Automobile (ACSIA), publiait une contribution au sujet des pistes d’avenir pour la filière automobile en France : « Enrayer le déclin du site automobile France ». La crise financière internationale de 2008 - 2009 avait mis à l’arrêt les usines de construction automobile en Europe.

Nous en appelions à un État stratège, capable d'anticiper ce que serait l’avenir de la mobilité. Nous attendions également un État qui soit en mesure de promouvoir des politiques de soutien aux investissements dédiés à la performance technologique des moyens de production. En effet, notre compétitivité se gagne toujours par l’innovation. Elle permet d’agir face à la concurrence tant en termes de qualité que de prix. Quels résultats en tirer aujourd'hui ? Ils n'inspirent que réserves et interrogations. Certes, les abondements publics ont permis le sauvetage, du premier groupe français et dix ans plus tard du second ... Les milliards injectés en capital et les cautions de l’État pour obtenir les crédits de trésorerie ont assuré les redressements financiers. Pour autant, il y eut à suivre les restructurations d’établissements, les fermetures et délocalisations.

Durant toute cette période, d’autres pays se sont dotés de capacités industrielles impressionnantes. Pour s’en convaincre, il suffit de consulter les statistiques. En 2008, La production française de véhicules était de 2,5 millions contre 70 dans le Monde. Nous étions au 7ème rang. En 2024, seulement 1,3 million de véhicules ont été fabriqués en France sur les 85 millions produits dans le Monde (12ème rang) ([1]). Durant cette même période, nous avons perdu quelques 10 000 emplois sur le site de construction automobile de la commune de Chartres de Bretagne. Évidemment, ce fut un choc en Ille et Vilaine et pour les Départements les plus proches d’où venaient également les salariés.

Que faut-il retenir ? La France aurait pu se prémunir de l’accès aux ressources stratégiques destinées à répondre aux défis des énergies alternatives, accorder les crédits d’impôts recherche sous la seule condition d’investir dans nos territoires pour en tirer l’avantage attendu avec de nouveaux process techniques de fabrication.

Il s’agissait ainsi de consolider l’écosystème de la Recherche et Développement (R & D) avec l’objectif de gagner en productivité, de préserver l’environnement et faire évoluer les conditions de travail. En outre, sommes-nous allés suffisamment loin dans les politiques de formation technique et scientifique des nouvelles générations ?

Plus aujourd’hui qu’hier encore, il s’agit d’élever la question de la réindustrialisation au rang de priorité nationale et d’adapter les emplois et les compétences en conséquence.

Le monde est déstabilisé comme jamais depuis 80 ans. L’État et nos collectivités sont confrontés à des finances exsangues du fait de l’affaiblissement de l’économie productive et de choix contestables en matière d’exonérations de contributions [CICE ([2]) par exemple] qui ont profité à des secteurs peu exposés à la concurrence sur les marchés internationaux. Sans nul doute, une redéfinition lucide et courageuse des trajectoires économiques s’impose dans l’urgence. Faits et chiffres à l’appui, les décennies de délocalisations et dérégulations quasi idéologiques des marchés ont induit une prédation environnementale majeure de territoires et pays à l’échelle de la Planète. D’ores et déjà, cette prédation débouche sur une multiplicité de crises sociétales dont nous sommes les témoins. Il sera très difficile de répondre à toutes ces crises en l’absence de ressources et moyens techniques à la hauteur. À cet égard, le choix des électeurs américains ne peut qu’inspirer nos inquiétudes.

Derrière ces mutations sans espoir de retournements rapides, nos entreprises industrielles locales se mobilisent pour préserver et consolider l’efficience de leurs moyens de production. C’est au prix d’efforts en innovations et réorganisations internes considérables qu’elles assurent leur pérennité dans la redoutable compétition industrielle d’échelle internationale. Les Directeurs et tous leurs collaborateurs, sans la moindre exception, méritent notre plus grand respect quant à leur engagement de tous les instants. Nous le savons tous, notre territoire dépend d’industries à la pointe des innovations techniques comme nulle autre dans le bassin d’emploi rennais et au-delà. Notre devoir de vigilance est de les accompagner.

                                                                                   Philippe Bonnin,

Maire de Chartres de Bretagne


[1] - Source Comité des Constructeurs Français d’Automobiles - CCFA.

[2] - CICE - Crédit d’Impôts pour la Compétitivité et l’Emploi.

 

mardi 29 octobre 2024

L'usine Stellantis de Chartres de Bretagne

https://journal-twipe.ouest-france.fr/data/276472/reader/reader.html?social#!preferred/0/package/276472/pub/435619/page/6/alb/8428152  

Article consacré à ses perspectives – Ouest France des 19 et 20 octobre 2024.

Je ne peux souscrire à l'appréciation formulée par Bernard Jullien, expert de l’industrie automobile à propos de l'usine Stellantis de Chartres-de-Bretagne. Nous avons collaboré au début des années 2010, lors de la crise industrielle de 2008 - 2012 dans le cadre de l'Association des Collectivités Site d'Industrie Automobile ACSIA.

L'avenir d'un territoire industriel ne dépend pas de sa seule localisation géographique qui présenterait l’inconvénient d’être trop éloigné des chaînes de valeur ou écosystème de la filière automobile, particulièrement présente à l’Ouest.

Le dynamisme économique d'un territoire, c'est d'abord sa vitalité démographique, la compétence et l'engagement de ses habitants, grâce aux politiques qualitatives de formation, entre autres dans le champ technique et scientifique. Ici même, les politiques d'aménagement du territoire qui se sont inscrites dans la durée constituent notre force. Nous en sommes des acteurs historiques. À cet égard, l’espace bretillien et breton a toujours su valoriser ses atouts et les conforter au gré des années ; qu’il s'agisse des infrastructures routières ferroviaires ou portuaires …

Rien ne justifie un tel doute sur nos industries de construction mécanique locales aux compétences diversifiées. Elles se développent encore dans tous nos bassins vie en Bretagne comme de tout l'Ouest de la France.

Certes, notre industrie automobile a terriblement souffert durant ces 15 dernières années. Toutefois, elle a su se restructurer et s'élever en qualité et normes pour s’assurer des meilleurs standards de productivité et par conséquent de compétitivité dans la France industrielle et bien sûr automobile.

Nous pouvons le regretter mais à l’heure actuelle, nous n’avons pas de relais dans le domaine de la mobilité qui représenterait le même potentiel d’emplois.

          Philippe Bonnin, Maire de Chartres de Bretagne

mardi 3 septembre 2024

Restaurer le pouvoir d’agir des communes

Un article d’opinion récemment publié dans le quotidien Le Monde (1) mérite une attention toute particulière. Au vu des représentations politiques à l’Assemblée Nationale et considérant l’impossibilité de constituer un gouvernement qui pourrait s’inscrire dans la durée, le Président de l’association des Maires de France propose de redonner plus de responsabilités aux institutions locales. Ce n’est pas une proposition de circonstance, c’est une nécessité.

Dans cet écrit, il est entre autres fait référence à l’article 72 de la Constitution en vigueur (2), rédigé comme suit : "les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l’ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en œuvre à leur échelon". Les communes, plus que toutes autres collectivités ont toujours su démonter qu’elles étaient les plus aptes à s’inscrire selon cette approche. Pragmatiques, les élus locaux ont toujours démontré leur capacité à engager les coopérations intercommunales utiles pour réaliser les projets qui nécessitaient une approche territoriale ou géographique plus large. Un tel principe se caractérise par un terme peu commun dans le langage habituel. Il s’agit de la subsidiarité. Elle caractérise le fait "qu’une autorité centrale ne doit effectuer que les tâches qui ne peuvent pas être réalisées à l’échelon inférieur". Depuis 2013 et jusqu’à cette date, les gouvernements sans exception ont très peu fait de cas de ce principe démocratique en dépréciant le rôle essentiel des élus de proximité ainsi qu’en portant atteinte au principe constitutionnel de l’autonomie des communes.

Toutes les réformes récentes se sont inscrites dans une démarche de prétendue rationalité. Les regroupements de compétences essentielles à l’échelon de nouvelles instances supra-communales, imposés par la loi, ont affaibli nos assemblées communales par essence proches des habitants-citoyens. Toutes les évaluations de pertinence relatives à ces réformes ont démontré que les regroupements et concentrations des "compétences transférées" vers les échelons supérieurs ont engendré des coûts bien plus élevés et des lourdeurs administratives inégalées. Le constat est sans appel.

À l’heure ou le pays traverse une profonde crise de confiance à l’encontre de l’action publique, il est urgent d’en finir avec un modèle politique descendant, illisible et décrédibilisé alors même que les finances publiques sont au plus mal et que les inégalités se creusent. Dans un tel contexte il n’y a strictement aucun hasard pour que la contestation dans les urnes en soit arrivée à ce point. Enfin, n’écartons surtout pas le contexte d’une économie à bout de souffle, et qui plus est, lourdement désindustrialisée.

Tout était réuni pour que les partis populistes retrouvent un regain d’intérêt en propageant des idées et promesses simplistes dont on se demande comment elles pourraient être concrètement tenues.

Pour conclure, en ce qui nous concerne, la ville de Chartres-de-Bretagne est très dépendante d’une réalité économique en déclin sur son territoire depuis 2010, provoquant aujourd’hui une forte incertitude budgétaire (3). Force est de constater que la Métropole rennaise n’attire pas les entreprises de production, alors même que nous observons en France une reprise de l’investissement industriel. Face à ce constat, nous devons relancer l'action économique autrement et construire une politique d’investissements publics, avec malgré tout très peu de marges de manœuvre

                                                                      Philippe Bonnin

1 - Redonner du pouvoir aux collectivités locales ; David Lisnard, Président de l’AMF, Maire de Cannes et Sébastien Populaire, Maire de Touillon-et-Loutelet (Doubs). Le Monde du 8 août 2024.

2 - Constitution de la Ve République, le 4 octobre 1958.

3 - 60 % de nos recettes fiscales directes proviennent du Foncier bâti Industriel. En 2 ans, nous avons perdu 300 000 € de recettes !

 

lundi 2 septembre 2024

Malgré la crise économique : les travaux en cours et à venir

Dans le contexte économique très incertain et maintenant politique … les investissements des communes exercent un rôle primordial pour assurer un développement local harmonieux et durable. En donnant la priorité à nos équipements de proximité, nous confortons le lien social et soutenons l'économie locale. Pour cela, il nous faut consacrer une part suffisante des ressources budgétaires à l’investissement au service de tous. Toutes ces initiatives permettent de construire une dynamique locale forte et solidaire ; une dynamique contributive à la qualité de vie et créatrice d'emplois.

Dès le début du présent mandat, nous-nous sommes engagés à poursuivre les projets de réalisation et rénovation d’équipements publics, de même que la mise en œuvre de politiques environnementales concrètes. Depuis 2020, nous avons construit le Pôle Solidarité près de la Mairie, l’extension de la résidence EHPAD de la Poterie, la requalification du centre de loisirs des longues Hayes, la réfection des deux cours d’école de l’Auditoire, la rénovation du bâtiment associatif du Pôle Sud … Et bien d’autres travaux, notamment de sécurité via des mises aux normes actuelles, ainsi que le remplacement d’équipements de sécurité (accès PMR, ascenseurs, …) Tout ceci représente déjà plus de 5 millions d’euros d’investissements. Concernant la rénovation énergétique, l’ensemble des travaux réalisés depuis 2006 nous a permis de diminuer notre consommation annuelle de plus 1,5 million de KWH électriques et thermiques. Des projets d'autoconsommation collective d’électricité, avec l'installation de panneaux photovoltaïques sur les toitures des bâtiments communaux et privés existants ou futurs sont en cours.

Aujourd’hui, les symptômes de la crise économique se traduisent par l’inflation, des entreprises en difficulté, des retards dans les chantiers. C’est aussi la précarité aggravée pour les catégories sociales les plus modestes. Enfin, fait sans précédant : des réformes fiscales ont été instaurées depuis 2021 ([1]) au détriment des collectivités, dont les communes. La responsabilité incombe clairement aux gouvernements de ces dernières années. Ainsi, l’épargne communale pour investir s’est réduite de moitié ! Chartres de Bretagne ne fait pas exception, bien au contraire … et si nous pouvons encore investir, ce qui loin d’être le cas des communes même voisines, c’est d’abord grâce aux bons résultats financiers obtenus jusqu’en 2020 compris.

Dans ce contexte, trois programmes sont d’actualité : La salle de sports des portes de la Seiche dont les travaux ont commencé cet été, la maison éco-citoyenne et une nouvelle crèche municipale. Ces deux derniers dossiers sont au stade des permis de construire et des appels d’offres pour l’exécution des travaux.

Concernant les projets de la Gendarmerie, les autorités du Groupement départemental avec qui nous échangeons très régulièrement ainsi qu’avec les instances préfectorales sont dans l’attente des décisions du futur Ministre de l’intérieur … Espérons une réponse pertinente et rapide !

Il reste des projets plus modestes qui mobilisent toute notre attention et celle des services de la ville qui font un travail remarquable. Nous sommes en passe d’atteindre nos objectifs malgré tous les défis à surmonter.

                                                                   Les élus communaux chartrains


[1] - Réformes votées par le Parlement !

 

mardi 25 juin 2024

Voyage en terres inconnues?

La décision présidentielle de dissoudre l’Assemblée nationale et de convoquer les électeurs à la veille des vacances d’été pour élire de nouveaux députés nous a tous sidérés. Dans la halle de La Conterie qui héberge les bureaux de vote, nous en étions au décompte définitif des voix lorsque cette nouvelle nous est arrivée... Improbable ! Comme des millions de citoyens attachés à la République et ses valeurs humanistes, nous avons eu ce sentiment d’entrer en "terres inconnues"... Certes, nous pressentions déjà que les premiers résultats estimés à l’échelle nationale justifiaient une probable déclaration solennelle et grave du Président de la République. Elle le fut bien au-delà de nos suppositions… Convenons qu’il n’est pas utile d’en ajouter au déluge des déclarations et articles de presse, parfaitement justifiés.

Je souhaite toutefois exprimer un point de vue partagé par la très large majorité des 34 000 maires de France et ce bien avant les actuels évènements électoraux. La commune : c’est le plus vieil échelon territorial de la République. Ces dix dernières années, tous les gouvernements successifs ont enchaîné des réformes qui l'ont privée de compétences au profit de supra-communalités. Celles-ci sont perçues comme un échelon administratif éloigné des habitants avant d’être un espace concret et légitime. Or, tout ce qui concourt à éloigner les lieux de décisions des habitants affaiblit la commune et, in fine, le lien démocratique.

Faits sans précédent depuis les années 1980, privés de moyens techniques et financiers, les élus municipaux n’ont plus de capacités opérationnelles pour conduire des politiques d’accompagnement social. C’est également vrai pour la prise en main des projets d’accueil et de soutien à l’économie de proximité comme industrielle, toutes pourvoyeuses d’activités et d’emplois durables. Hélas, nous sommes très loin du compte…

Une telle réalité n’est pas sans lien avec tous les événements subis ; qu’il s’agisse des manipulations, des violences, du complotisme et d’accusations honteuses parce que mensongères. Ce sont des comportements affligeants auxquels tous les élus locaux de France sont confrontés. Ici même, rien ne nous a été épargné. Toutefois, sachez qu’aucun délit, qu’aucune accusation ne sont laissés de côté et nous veillons scrupuleusement à ce que la Justice assure ses missions jusqu’à son terme.

Convenons-en tous, de tels évènements et troubles ne peuvent qu’inciter au vote en direction de partis démagogues et populistes. Les problèmes bien réels sur lesquels se fonde leur succès (pouvoir d’achat, logement, accès aux soins...) appellent d’autres réponses que des solutions simplistes. En ces heures, il n’est pas encore trop tard pour nous mobiliser et appeler au vote en faveur de candidats députés qui adhèrent à l’esprit républicain, au respect d’autrui, quelle que soit son origine ; des candidats qui prônent la non-violence et adhèrent aux principes fondateurs de la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Toute incitation à la haine, au racisme et à la xénophobie ne conduira qu’à la destruction de notre patrimoine républicain, empreint d’humanisme.

Philippe Bonnin

Maire de Chartres de Bretagne

Le 24 juin 2024