Un article d’opinion récemment publié dans le quotidien Le Monde (1) mérite une attention toute particulière. Au vu des représentations politiques à l’Assemblée Nationale et considérant l’impossibilité de constituer un gouvernement qui pourrait s’inscrire dans la durée, le Président de l’association des Maires de France propose de redonner plus de responsabilités aux institutions locales. Ce n’est pas une proposition de circonstance, c’est une nécessité.
Dans cet écrit, il est entre autres fait référence à l’article 72 de la Constitution en vigueur (2), rédigé comme suit : "les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l’ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en œuvre à leur échelon". Les communes, plus que toutes autres collectivités ont toujours su démonter qu’elles étaient les plus aptes à s’inscrire selon cette approche. Pragmatiques, les élus locaux ont toujours démontré leur capacité à engager les coopérations intercommunales utiles pour réaliser les projets qui nécessitaient une approche territoriale ou géographique plus large. Un tel principe se caractérise par un terme peu commun dans le langage habituel. Il s’agit de la subsidiarité. Elle caractérise le fait "qu’une autorité centrale ne doit effectuer que les tâches qui ne peuvent pas être réalisées à l’échelon inférieur". Depuis 2013 et jusqu’à cette date, les gouvernements sans exception ont très peu fait de cas de ce principe démocratique en dépréciant le rôle essentiel des élus de proximité ainsi qu’en portant atteinte au principe constitutionnel de l’autonomie des communes.
Toutes les réformes récentes se sont inscrites dans une démarche de prétendue rationalité. Les regroupements de compétences essentielles à l’échelon de nouvelles instances supra-communales, imposés par la loi, ont affaibli nos assemblées communales par essence proches des habitants-citoyens. Toutes les évaluations de pertinence relatives à ces réformes ont démontré que les regroupements et concentrations des "compétences transférées" vers les échelons supérieurs ont engendré des coûts bien plus élevés et des lourdeurs administratives inégalées. Le constat est sans appel.
À l’heure ou le pays traverse une profonde crise de confiance à l’encontre de l’action publique, il est urgent d’en finir avec un modèle politique descendant, illisible et décrédibilisé alors même que les finances publiques sont au plus mal et que les inégalités se creusent. Dans un tel contexte il n’y a strictement aucun hasard pour que la contestation dans les urnes en soit arrivée à ce point. Enfin, n’écartons surtout pas le contexte d’une économie à bout de souffle, et qui plus est, lourdement désindustrialisée.
Tout était réuni pour que les partis populistes retrouvent un regain d’intérêt en propageant des idées et promesses simplistes dont on se demande comment elles pourraient être concrètement tenues.
Pour conclure, en ce qui nous concerne, la ville de Chartres-de-Bretagne est très dépendante d’une réalité économique en déclin sur son territoire depuis 2010, provoquant aujourd’hui une forte incertitude budgétaire (3). Force est de constater que la Métropole rennaise n’attire pas les entreprises de production, alors même que nous observons en France une reprise de l’investissement industriel. Face à ce constat, nous devons relancer l'action économique autrement et construire une politique d’investissements publics, avec malgré tout très peu de marges de manœuvre
Philippe Bonnin
1 - Redonner du pouvoir aux collectivités locales ; David Lisnard, Président de l’AMF, Maire de Cannes et Sébastien Populaire, Maire de Touillon-et-Loutelet (Doubs). Le Monde du 8 août 2024.
2 - Constitution de la Ve République, le 4 octobre 1958.
3 - 60 % de nos recettes fiscales directes proviennent du Foncier bâti Industriel. En 2 ans, nous avons perdu 300 000 € de recettes !